La KU Leuven, chouchoute du Big Pharma

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"Pour la seconde fournée d’Open Pharma, « Le Soir » s’est penché sur les flux financiers entre firmes pharmaceutiques et universités belges (ainsi que leurs hôpitaux universitaires). Un premier constat : la KU Leuven rafle la mise. Un second : la transparence, ce n’est toujours pas ça."

"Dans le travail d’analyse mené par De TijdKnackLe Soir et Médorsur les montants versés par l’industrie pharmaceutique aux différents acteurs des soins de santé, les universités font partie des organisations les mieux loties. Ce qu’on sait avec certitude, c’est qu’entre 2017 et 2020, le pharma déclare avoir dépensé 70 millions d’euros dans des honoraires de consultance, des frais de voyage et de logement, ou pour des donations aux universités et leurs hôpitaux. Mais ça, c’est uniquement la partie émergée de l’iceberg."

"Sous la surface, se cache l’enveloppe « recherche et développement » (R&D), pour laquelle il n’existe pas de ventilation… Elle est donc inexplorable. Il est vraisemblable que le gros des 520 millions d’euros qu’elle contient (soit près de 60 % du total versé par les firmes pharmaceutiques en Belgique sur quatre ans) aille vers les universités et leurs hôpitaux, mais il est impossible de savoir qui a touché combien. Seule certitude, cette fameuse R&D sert surtout à financer des essais cliniques. Domaine dans lequel la Belgique excelle, occupant la troisième place du classement européen du nombre d’études cliniques par habitant."

"Comment la KU Leuven rafle le gros lot"

"Quand on regarde les chiffres de plus près, on remarque que c’est la KU Leuven qui encaisse le plus de fonds. Elle affirme déjà réaliser la moitié des essais cliniques se déroulant sur notre territoire. Puis sur les 70 millions versés par Big Pharma aux universités belges de 2017 à 2020 (hors R&D, donc), l’université louvaniste surclasse aussi toutes les autres. Avec ses campus – dont l’UZ Gasthuisberg, le plus grand hôpital universitaire de Belgique – elle a perçu 23,3 millions d’euros. C’est en tout cas le montant qui est déclaré par l’industrie pharmaceutique dans le registre officiel betransparent. Les universités francophones (et leurs hôpitaux) les plus financées sont, elles, bien derrière : 7,3 millions pour l’UCLouvain, 5,4 millions pour l’ULiège et « à peine » 3,9 millions pour l’ULB (lire par ailleurs)."

"Dans les faits, l’enveloppe de la KU Leuven serait encore plus fournie. Certains médecins académiques rattachés à l’université nous ont en effet fait part d’erreurs dans leur déclaration personnelle. Ils n’ont jamais perçu les montants déclarés sur betransparent. « Tout ce qui est repris à mon nom est incorrect », s’exclame ainsi Chantal Mathieu, endocrinologue. « Je ne fais rien dans le privé, tout l’argent va à la KU Leuven ou à l’UZ Leuven. J’ai fait vérifier les montants et, comme je suis cheffe de service, tout le sponsoring du service est à mon nom, alors qu’il devrait être au nom de l’université ». Ce type d’erreur se serait également répété pour bon nombre de collègues. En dehors de ces problèmes d’encodage, certains services ou groupes de médecins structurés en ASBL, qui gravitent autour des universités, peuvent également percevoir en ligne directe des subventions des sociétés pharmaceutiques. Celles-ci échappent au présent comptage."

"Globalement, l’argent du privé, et donc du pharma, ne représenterait qu’une très petite portion des fonds dédiés à la recherche. « Environ 6 % », affirme la Conférence des Hôpitaux Académiques de Belgique (Chab). « Les hôpitaux universitaires belges reçoivent relativement peu de fonds publics pour leurs missions essentielles, par rapport aux autres hôpitaux universitaires européens », insistent-ils. « Au niveau régional, les universités francophones sont, en outre, moins bien financées que leurs homologues néerlandophones », ajoute Françoise Smet, doyenne de la faculté de Médecine de l’UCLouvain. « Ces financements permettent de développer une recherche qui est incomplètement ou insuffisamment financée par le secteur public », pointe le doyen de la faculté de Médecine de l’ULiège, Edouard Louis."

"Le cabinet de Valérie Glatigny (MR), ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique en Fédération Wallonie-Bruxelles, rappelle de son côté que les montants mis à disposition de la recherche s’élèvent tout de même à 3 % du PIB pour un total de 405 millions d’euros. Tout en reconnaissant qu’il est nécessaire que les entreprises complètent ce financement."

"Un cercle vertueux ?"

"Bien qu’il s’agisse de la plus grande université belge, la différence de traitement entre la KU Leuven et les autres universités interpelle car elle peut sembler disproportionnée. Pourquoi elle et pas les autres ? « Depuis de nombreuses années, la KU Leuven mène une politique proactive de collecte de fonds et de mécénat professionnel, à l’instar des grandes universités étrangères », dixit Sigrid Somers, porte-parole de l’université. « Dans ce cadre, nous recevons le soutien financier de particuliers mais aussi d’entreprises, notamment via des chaires autour desquelles nous avons bâti une forte tradition au cours des dernières décennies. » Sur les 112 chaires de la KU Leuven, 70 sont d’ailleurs liées au monde médical."

"Un état de fait qui n’étonne pas la petite sœur francophone. « La KU Leuven est aussi un gros récipiendaire des fonds nationaux, fédéraux et européens. Or plus vous avez de moyens financiers à votre disposition, plus vous devenez attractif », estime Françoise Smet. « La valeur du projet dépend, entre autres, de la solidité de l’équipe de recherches, de ce qui a déjà été publié par cette équipe. » Ce cercle vertueux pourrait jouer, de façon marginale, dans les classements des meilleures universités. « Il peut y avoir une forme d’injustice. C’est sans doute toujours plus facile pour les grosses équipes. Mais si les grosses équipes restent au top, c’est qu’elles font les choses correctement. »"

"Une (faible) sensibilisation des étudiants"

"Face à ces collaborations, plus ou moins fréquentes, comment les universités sensibilisent-elles leurs futurs médecins au risque de conflits d’intérêts ? « Les étudiants y sont sensibilisés tout au long de leur cursus, dans les différents cours lorsque l’occasion s’y prête et dans le cours de déontologie », insiste la doyenne de la faculté de Médecine de l’UCLouvain. Bien qu’ils aient suivi ce cours (que certains trouvent inadapté à la réalité de terrain), plusieurs jeunes médecins assistants candidats spécialistes en formation (Maccs) relativisent quelque peu. « On ne voit vraiment rien qui a trait à la relation avec les entreprises pharmaceutiques… », nous explique une Maccs passée par l’UCLouvain. Si ce n’est la mention de l’un ou l’autre travail pratique où le sujet serait abordé de manière fort superficielle."

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