A l’attention du Collège des Bourgmestre et Echevins,
Bruxelles le 4 janvier 2022
Veuillez trouver une interpellation que nous souhaitons introduire auprès du prochain Conseil communal dans le contexte de l’obligation du port du masque dans l’enseignement primaire.
CONTEXTE
La Ministre de l’enseignement Caroline Désir a déclaré publiquement que le port du masque pour les enfants dans l’enseignement primaire « porterait atteinte de manière disproportionnée à l’équilibre des enfants avec les dangers que cela comporte en termes de santé mentale, de développement psycho-social et sans qu’un gain réel puisse être obtenu sur le plan de la santé publique[1] ».
Deux semaines précédant la décision du CODECO du 3 décembre 2021, la Ministre Caroline Désir précisait dans sa circulaire n°8349 du 19 novembre 2021[2] que le gouvernement avait pris la décision de ne pas l’appliquer dans l'enseignement primaire en Fédération Wallonie Bruxelles pour les mêmes motifs.
Madame l’Echevine a fait part, dans son courriel du 30 décembre 2021, adressé à Madame Sabine Moens de Fernig :
- qu’elle avait pris le temps d’une discussion sérieuse avec une cheffe d’un service de pédiatrie d’un hôpital. Elle dit s’être largement renseignée à propos de cet aspect qui l’interpelle, qu’elle pourrait aussi faire référence à de nombreux articles argumentant dans un sensfavorable au port du masque dès 6 ans. Elle termine ce passage de son courriel en disant qu’elle ne souhaite pas entrer dans une polémique nourrie des positions des uns et des autres.
- que même si le port du masque n’est agréable pour personne, « les enfants le supportent assez facilement et certains sont même très fiers de pouvoir faire « comme les grands » ». Nous tenons à relever ce dernier point. Si « faire comme les grands » peut avoir un effet structurant et positif dans le cheminement de croissance et développement d’un enfant, il est des domaines où il est préférable que l’enfant ne fasse pas comme les grands parmi lesquels la consommation d’alcool, le tabagisme ... Il en va de même pour toute attitude qui consiste à se soumettre à toute mesure ou consigne injustifiée à divers égards : tel le port du masque à l’école.
Quant au fait que les enfants le supportent « assez facilement » : certains enfants pleurent parce qu’on leur met un masque sur le nez et la bouche. Des enseignants craquent et s’en vont pleurer en cachette parce qu’ils ne supportent pas de voir des enfants en souffrance du fait de ce dispositif. Cela aussi c’est une réalité.
- que « le masque n’est pas le réel problème pour les enfants, mais plutôt des tensions qui entourent son port... ». Nous sommes d’avis que ces tensions surviennent du fait que le politique a décidé qu’il fallait mettre cette mesure en œuvre. La responsabilité de la survenue de ces tensions dont les enfants sont victimes du fait de divers conflits de loyauté ne revient qu’aux gouvernants à l’origine de cette décision et non aux personnes qui questionnent et contestent cette mesure.
- qu’elle fera appliquer la directive imposant le port du masque aux enfants tout en leur laissant des temps de pause au motif qu’il est prouvé que les nouveaux variants de la COVID (Delta, Omicron, ...) touchent largement les enfants et que si leur processus vital est rarement mis en cause, ils sont devenus un facteur important de propagation du virus.
De nombreuses études établissent aujourd’hui à suffisance les dommages sur le développement cognitif et psychologique qu’une telle mesure peut engendrer chez les jeunes enfants.
Certains parents ont pu faire l'expérience des dégâts collatéraux considérables du port du masque sur les capacités d'apprentissage, d'écoute, d'attention des adolescents à l’école, nous vous laissons donc le soin d'imaginer sur des enfants plus jeunes.
L'OMS a listé plusieurs effets indésirables liés au port du masque[3] dans le contexte de la pandémie de Covid-19 en juin 2020. Contrairement aux dires de l’Echevine de l’Enseignement, il est indiqué qu’il peut être "mal supporté" et représenter des "désavantages et difficultés" chez les enfants.
Parmi la liste des désavantages établie par l'OMS et liés au port du masque « dans le grand public, par des personnes en bonne santé », on peut relever ceux-ci :
• risque potentiellement accru d'autocontamination dû au fait de manipuler un masque facial puis de se toucher les yeux avec des mains contaminées ;
• autocontamination possible si un masque non médical humide ou sale n'est pas remplacé, favorisant ainsi la prolifération de micro-organismes ;
• mal de tête et/ou difficultés respiratoires possibles selon le type de masque utilisé ;
• lésions cutanées faciales, dermite irritative ou aggravation de l'acné en cas de port fréquent et prolongé du masque ;
• difficulté de communiquer clairement.
Enfin, le blog #covidrationnel a publié une analyse[4] qui reprenait en son point 5) :
« Le GEMS a enfin recommandé d‘équiper les écoles de quelques appareils simples, portatifs, de mesure du CO2, coûtant de 50 à 150 euros pièce. Dans sa Circulaire 8376 du 03/12/21, la Fédération Wallonie-Bruxelles recommande “ouverture des fenêtres à partir de 900 ppm et sortie du local le temps de renouveler l’air au-delà de 1200 ppm”. Mais il faudrait assortir cela de recommandations, d’une sensibilisation et d’une formation des enseignants et élèves à l’importance de la ventilation, à trouver les bonnes pratiques à mettre en œuvre dans chaque classe pour garantir une qualité d’air propice à un faible risque viral, mais aussi à de bonnes conditions d’apprentissage. »
Cette analyse conclut en ces termes :
« la ventilation devrait être LA mesure non-pharmaceutique prioritaire[5]. Contrairement à toutes les mesures mises en avant jusqu’à présent, aération et ventilation n’entraînent pas d’effets secondaires dommageables sur l’éducation, le vivre ensemble ou l’activité économique. Au contraire, elles peuvent être facilement maintenues sur le long terme et avoir des effets bénéfiques sur la propagation des autres infections respiratoires, ainsi que sur la qualité de toutes nos activités, notamment d’apprentissage, en intérieur ».
Ce sur quoi nous pouvons à tout le moins nous rejoindre : les avis sont plus que divers.
Vu cette diversité d’avis ;
- sachant qu’il est question de préserver les santés physique et psychique des enfants,
- sachant que la Convention Internationale des Droits de l’enfant qui dit : « Au sens de la présente Convention, un enfant s’entend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable." Et qui prévoit en son article 3 :
« Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale. »
- Sachant que la mesure masque dès 6 ans repose sur une hypothèse très contestable du fait que l’enfant serait devenu depuis ce mois de décembre 2021 une source de danger pour ses pairs et les autres ce qui lui renvoie une image de lui-même hautement délétère ;
- Sachant que de nombreux avis divergent de ceux développés par Madame l’Echevine ;
N’y aurait-il dès lors pas lieu d’appliquer un autre grand principe auquel tout responsable décideur, politique ou non, doit rester attaché : celui du principe de précaution. Ce dernier devant s’appliquer aux enfants et imposer que toute autre mesure (dont celles de ventilation) ne présentant aucun impact négatif sur les enfants devrait être privilégiée.
Enfin nous constatons quand il s’agit de culture, la commune d’Uccle n’hésite pas à enfreindre les règles du CODECO du 22 décembre 2021. Le centre culturel d’Uccle avait alors informé, qu’en accord avec son Conseil d’Administration et de l’Echevine de la Culture, prendre la décision de rester ouvert et de maintenir toutes les représentations planifiées en précisant que la culture ne doit pas payer le prix fort de la crise. Et les enfants ? Ne pensez-vous pas qu’ils aient payé un prix déjà suffisamment important du fait de la gestion sanitaire de la situation ?
QUESTIONS
• Vu les dangers potentiels du port du masque sur les jeunes enfants, comment l’échevinat de l’enseignement peut-il décider d’infliger ces mesures dans les écoles communales d’Uccle qui sont sous sa responsabilité ? Quelles sont les raisons pour lesquelles l’échevinat, voire le Collège, n’a pas opté pour le principe de précaution évoqué ci-dessus ?
• La commune d’Uccle, représentée par les Bourgmestre et Echevins, est-elle prête à porter la responsabilité financière de tout dégât cognitif éventuel du port du masque sur des jeunes enfants scolarisés dans les écoles communales ? Si oui, quelle procédure a-t-elle prévue et en a-t-elle fait part aux parents ?
• Comment la commune explique-t-elle pouvoir enfreindre les règles du Codeco pour la culture et ne pas en faire de même lorsque l'on touche au bien-être des enfants et à la défense de leur intégrité physique et psychique ?
Nous conclurons notre interpellation par les mots de Hannah Arendt que Françoise Tulkens[6], ancienne vice-présidente de la Cour européenne des droits de l’Homme, a rappelé récemment dans un entretien : « le fond de la désobéissance civique, c’est de rappeler l’esprit des lois ». Ce rappel de l’esprit des lois est un devoir qui incombe autant aux citoyens et citoyennes qu’aux élu.e.s politiques.
Est-ce que le collège des Bourgmestre et Echevins ainsi que ses conseillers vont sortir du lot en mettant la santé mentale et physique des enfants au centre de leurs préoccupations ou vont-t-ils faire perdurer la maltraitance psychologique que nos jeunes subissent depuis près de 22 mois ?
Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que la responsabilité de l’auteur et ne représentent pas nécessairement celle de BAM!
[1] https://www.rtbf.be/article/port-du-masque-des-6-ans-a-l-ecole-a-courcelles-les-parents-pourront-finalement-choisir-10632469?id=10632469
[2] http://www.enseignement.be/index.php?page=26823&do_id=8604
[3] https://www.md-universal.eu/images/WHO-2019-nCov-IPC_Masks-2020.4-fre.pdf
[5] https://www.health.belgium.be/sites/default/files/uploads/fields/fpshealth_theme_file/20210917_css-9617_aspects_environmentaux_de_covid-19_vweb.pdf p. 15, “Ces résultats expliquent également pourquoi une ventilation suffisante et efficace des pièces est la stratégie dominante dans un climat belge pour prévenir les infections.“
Lien vers la lettre:
220102 - Interpellation citoyenne Uccle
Source Photo :
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